La négociation n’est pas réservée aux seuls acheteurs et commerciaux. C’est un outil qui permet de trouver un accord.
La définition d’une négociation est :
Une série d’entretiens, d’échanges de vues et de démarches que l’on entreprend pour parvenir à un accord.
Donc, toute personne ayant besoin de parvenir à un accord dans une entreprise – et il en existe des légions – est censée être capable de négocier. C’est vrai pour un chef de projet, pour un patron de R&D, que l’on opère dans les finances ou n’importe quel niveau de poste (par exemple une assistante avec son patron), c’est également vrai quand on opère pour des raisons personnelles. Dans tous les cas de figure, on est censé savoir négocier.
La négociation, c’est quoi au juste ?
Il existe une autre définition intéressante de la négociation :
Une confrontation de protagonistes étroitement ou fortement inter-dépendants.
Cela veut dire qu’aucune des deux parties n’est supposée obtenir un avantage sans contrepartie vis-à-vis de l’autre. Donc, nous sommes bien deux à vouloir obtenir quelque chose.
Revenons à la première définition. Celle-ci nous dit que quelque part l’objectif est de parvenir à un accord. La négociation est également lié à un certain rapport de forces. On doit donc intégrer dans la négociation – et il est fréquent que les non-commerciaux ne le fassent pas – qu’il y a un rapport de forces. La gestion de ce rapport de force est un élément clé de la négociation. Le dernier point c’est d’avoir un minimum de volonté d’aboutir à un arrangement. Et ce, quel que soit le niveau de difficulté, ou quelquefois même d’antagonisme ou d’agressivité : on est toujours assis l’un en face de l’autre en vue d’aboutir à un accord.
De l’importance de la préparation
Une des choses qui va représenter 80% de la négociation, c’est la notion de préparation. Cette préparation consiste en plusieurs phases.
Découper la négociation en clauses
La première chose de découper l’ensemble des choses dont on veut discuter et d’en faire des clauses à négocier.
Définir les points non-négociables
Puis, pour chacune de ces clauses, la 2ème étape est de décider si c’est quelque chose de non négociable. Quand on parle de non-négociable, cela signifie ceci : ‘je m’en vais, je quitte la table des négociations’. Ce n’est pas juste un bluff, c’est une vraie problématique. C’est : ‘de toutes façons, je ne pourrais pas céder’. Prenons un exemple : ‘ma maison vaut 500 000 €, on m’en propose 200 000, je n’irais pas discuter à 200 000 € étant donné que la valeur réelle est à 500 000.’ Autre exemple : ‘mon travail représente 10 000 €, je ne vais pas accepter qu’on me prenne pour 5 000’prenne pour 5 000’. Pour un projet, ’10 jours de projet, ce n’est pas 5 jours. Je ne pourrais pas livrer ce qui est attendu en 5 jours. Ce n’est pas une mauvaise volonté de ma part, il y a là une infaisabilité technique.’
Définir les points négociables
Maintenant, à partir du moment où je m’autorise à avoir des points non-négociables, je dois quelque part avoir des points négociables.
Il faut que je trouve ou que je crée des points sur lesquels nous pouvons discuter, de façon à ce que l’autre puisse gagner. Parce que sinon, nous ne pourrons pas construire la règle du gagnant-gagnant.
Je suis en partie responsable de cette règle du gagnant-gagnant puisque je suis censé trouver des points sur lesquels je vais pouvoir lâcher, à la satisfaction du partenaire que j’ai en face de moi. Rappelons que nous sommes ici dans une formation à la négociation pour non-commerciaux.
Définir des concessions
Dernier point, il faut prévoir des concessions.
Quelle est la différence entre un point négociable et une concession ?
- Un point négociable, quand je le lâche, je veux une contrepartie. ‘Je suis d’accord de descendre de 10 jours à 8 jours, mais alors, je veux qu’on m’alloue une ressource supplémentaire. Ou bien une sous-traitance externe. Un budget supplémentaire.’ En clair : ce geste ne sera pas gratuit.
- La concession, c’est un geste gratuit. ‘J’ai déterminé que le projet prendrait 10 jours mais je sais que je peux le faire en 8 jours. Et ces 2 jours, je les offre.’
La concession n’a qu’une seule finalité : créer de la satisfaction chez la partie adverse. Donc, je ne fais que m’assurer que, si j’exige des points non négociables, j’ai aussi des concessions pour les équilibrer.
Equilibrer ces divers points
Par la suite, l’intelligence de la construction va être de faire quelque chose d’équilibré. Je mesure le nombre de points non-négociables, je regarde combien j’ai de points négociables et de concessions. Si cela est équilibré, la négociation est déjà gagnant-gagnant.
Ce que je viens d’exposer là, très peu de gens le font. Ils préparent la négociation mais ils ne la préparent pas dans l’idée de construire du gagnant-gagnant. Donc ils ne sont pas dans la volonté d’aboutir, ce qui est dans la définition de départ.
Pour gérer ce point de la préparation, il existe des tableaux, des matrices… Ce sont des éléments importants que nous abordons en détails dans mes formations.
Qu’est-ce qu’une situation de blocage ?
Une fois que nous avons défini les points énoncés plus haut, il reste encore deux points à préparer, lesquels sont souvent oubliés, ce qui amène alors une situation de blocage que l’on n’arrive pas à gérer.
Une situation de blocage est un point non-négociable à la fois pour votre interlocuteur et pour vous-même.
Revenons sur ce qu’un point non-négociable, par exemple, une infaisabilité technique de part et d’autre. Ce n’est aucunement une mauvaise volonté de la part des personnes qui négocient, c’est vraiment une infaisabilité concrète et réelle.
La solution de repli
La seule façon de sortir d’un tel problème, c’est de trouver ou construire ce que j’appelle une solution de repli / dégradée.
Nous avons plusieurs moyens pour y arriver :
- On dégrade le matériel ou la qualité de celui-ci : ‘nous ne partons pas sur des iPhone 7 mais sur de l’iPhone 5. Nous ne partons sur un projet avec 10 lots, mais sur un projet avec 4 lots.’ Je ne livre pas la totalité ce qui était prévu. ‘Je n’ajoute pas 3 ailes à la bibliothèque mais seulement 1. Je ne peux pas acheter 5 trains, j’en prends 3. Le client voulait une voiture neuve mais n’en a pas les moyens, nous proposons une voiture d’occasion.’ L’idée, c’est que mon budget est fixe, il ne peut pas bouger, donc la quantité d’achats est réduite. Si l’on ne peut pas m’allouer de ressources, alors tant pis, le délai va s’allonger.
- On enlève du service : ‘je ne livre pas le client, c’est lui qui vient chercher le matériel chez moi. Ou bien il paye les frais de transport.’ Et donc cela m’enlève le coup du transport.
Nous n’avons pas là un élément de négociation mais une solution de repli que l’on utilise en cas de blocage. La proposition de départ est modifiée, du fait que les contraintes sont trop fortes et qu’on ne peut pas aboutir, dans le cadre de la 1ère négociation.
La sortie par le haut
On peut aussi utiliser une autre solution : la sortie par le haut. Lorsque la personne nous dit que finalement, sur un projet donné, elle ne peut pas donner de ressources, je lui propose alors de globaliser plusieurs projets : ‘je récupère les ressources de 3 autres projets pour faire celui-ci’. Nous augmentons le ‘territoire’ de ces 3 autres projets.
Avant même d’aller voir la personne avec qui on va discuter, il faut avoir préparer tout cela. On est juste en train de raisonner les divers scenarii afin de pouvoir bien négocier.
Prévoir les attaques potentielles
Il est nécessaire d’anticiper que soient évoquées de potentielles ‘casseroles’. Est-ce qu’il existe des points sur lesquels la partie adverse pourrait insister pour nous déstabiliser. Des exemples ?
- Le dernier projet n’a pas été livré en temps et en heure.
- Quelque chose qui avait été promis n’a pas été réalisé.
- etc.
Ces points doivent être anticipés en regardant quelle réponse on y apportera. Sinon, ils risquent de créer des perturbations durant la négociation. En gros, tous les facteurs inattendus d’une négociation sont des facteurs perturbateurs. Donc, si l’on n’est pas un commercial, si l’on n’est pas un acheteur, si l’on n’a pas l’habitude de négocier, il importe d’insister sur cette partie qu’est la préparation. Si cela est fait, vous aurez garanti environ 80 % de la réussite d’une négociation.
Le rééquilibrage des rapports de forces
Il existe un autre point que nous devons aborder : le rééquilibrage des rapports de forces. Avant d’entrer dans la discussion / la négociation elle-même, il faut s’assurer qu’on traite d’égal à égal. On ne peut se faire envoyer dans les cordes et on ne peut pas commencer à discuter si de l’autre côté, il n’existe pas une volonté réelle de discuter. Un exemple : votre interlocuteur est constamment en train de critiquer votre dernière prestation, elle n’est donc pas en train de discuter de la nouvelle prestation. Il faut donc annuler dès le départ toute forme d’attaque potentielle et c’est que ce que j’appelle le rééquilibrage des rapports de forces. Ce n’est qu’alors que nous pouvons arriver au point de départ de la négociation : une volonté réelle des deux parties de trouver un accord. Si cela n’est pas là, on ne devrait pas démarrer la négociation. Comment rééquilibrer les rapports de force ? En expliquant que : On n’est pas là pour se faire engueuler, mais pour travailler ensemble. On ne voit pas en quoi l’agressivité de la partie adverse va améliorer quoi que ce soit dans la présente négociation. On est d’accord sur le fait qu’il peut être fâché par rapport au passé, on peut élaborer des solutions relativement à cela, mais les attaques, le dénigrement, la critique ne sont pas des facteurs clés de négociation. Il faut refuser de discuter dans des conditions pareilles. On instaure donc au départ des conditions correctes de discussion avec pour objectif de négocier un accord.
La négociation elle-même
Durant la négociation elle-même, il faut travailler trois points.
Valoriser les concessions
Si l’on effectue une concession, il importe qu’elle soit valorisée. Il ne faut donc lâcher cette concession qu’en ayant la certitude que la partie adverse a accepté la valeur réelle de la concession. Si ce n’est pas le cas, il ne faut pas accorder cette concession.
Autrement dit : si on considère que je ne fais pas d’effort, je ne donne pas l’effort.
‘Si je lui offre deux jours et qu’il me dit que ce n’est rien, que c’est facile, alors je ne lui donne pas les deux jours.’
Négocier
Négocier, cela veut dire que je suis prêt à faire des pas. ‘Je suis disposé à raccourcir le projet de 4 jours, par exemple de 10 à 6 jours. Si je descends à 9 jours, c’est un premier palier. Bien sûr, s’il veut obtenir 6 jours, il va râler. Mais je ne travaille pas pour lui faire plaisir, je veux juste m’assurer que nous sortions tous les deux gagnants de la négociation.’
J’ai donc une responsabilité à deux endroits : la mienne (les jours nécessaires pour réaliser le projet) et la sienne (qu’il soit satisfait).
‘A présent, je peux descendre à 7 jours, depuis le palier ‘cadeau’ que je lui avais fait en proposant 9 jours. Mais à présent, ce deuxième palier va être sujet à contrepartie : descendre à 7 jours va nécessiter une augmentation de budget de 12 %, ou bien d’obtenir deux ressources supplémentaires, un ordinateur plus puissant, etc.’
En d’autres termes, un geste de ma part, exigera à présent une contrepartie. De ce fait la négociation devient facile : je n’ai plus peur de faire des pas dans sa direction puisque chaque pas est associé à une contrepartie.
Bien évidemment, si la contrepartie n’est pas obtenu, le pas n’est pas fait. Et on en restera alors à la position de départ.
Tenir sa position
Le dernier entraînement à pratiquer dans la négociation pour les non-commerciaux, c’est la notion de : tenir une position / un refus.
Le non-négociable est non-négociable.
Il importe d’être ferme sur sa position, ce qui veut dire que l’on doit être capable de jouer la rupture.
Si on est capable de jouer la rupture, cela signifie qu’on peut dire non. On sait à quel moment pratiquer un silence pour faire accepter ce non. Et on sait qu’à ce moment là, on orientera la partie adverse sur une solution de repli.
Et s’il refuse la solution de repli, il ne reste qu’une alternative : quitter la table des négociations.
Nous avons donc là tous les éléments à maîtriser pour bien négocier.
Tristan Ebel – Intelligent Business
Si vous souhaitez devenir un professionnel de ce sujet, suivez cette formation :
Maîtriser l’art de la négociation